
Il y a des projets qui commencent par une simple curiosité et finissent en odyssée technologique. Le mien ? Transformer 47 images générées par IA en une vidéo cohérente. Spoiler : le mot cohérente est ici un doux euphémisme.
1. Midjourney : le laboratoire aux mille visages
Tout commence dans l'univers de Midjourney. Des dizaines d'images, autant d'angles, de styles, d'atmosphères explorées. J'ai testé le clair-obscur dramatique, la lumière d'orage électrique, la brume matinale vaporeuse, et même un cadrage façon western crépusculaire.
ChatGPT est devenu mon complice dans l'art délicat du prompting : chaque mot pèse son poids de pixels, surtout quand il s'agit de dompter une IA qui a cette fâcheuse tendance à me gratifier de trois bras ou à me métamorphoser en surfeur cosmique égaré dans l'espace-temps.
2. Photoshop : urgences chirurgicales pour pixels en détresse
Certaines images réclamaient une intervention d'urgence sous Photoshop : reconstruire un casque qui s'évapore mystérieusement, raffermir une barbe ayant pris la consistance de la gélatine, ou effacer un reflet surréaliste dans une flaque qui n'aurait pas dépareillé dans un Dalí.
Ce n'était pas un travail d'artiste contemplant son œuvre — plutôt celui d'un chirurgien débordé recollant des fragments de pixels avant qu'ils ne prennent définitivement la fuite.
3. Scénariser le chaos : quand l'ordre naît du hasard
Une fois les 47 images générées, il a fallu leur insuffler un sens narratif. Indexation, numérotation, classification : chaque image trouve sa place dans une chorégraphie visuelle. L'objectif : créer une vraie narration — avec un début, un milieu, une fin — et surtout éviter l'effet « diaporama sous acide des années 70 ».
C'est à ce moment qu'on comprend une vérité fondamentale : le montage vidéo ne commence pas sur la timeline, il commence dans l'intention.
4. HailuoAI : l'usine à transitions fluides
HailuoAI devient alors mon outil de prédilection. Le principe est d'une simplicité trompeuse :
- La première image devient la Start Frame
- La seconde, la End Frame
- On lance la génération, puis on recommence : la End devient Start, et ainsi de suite sur 46 itérations
Résultat : 46 séquences de 6 secondes chacune. Une mécanique apparemment simple, mais diaboliquement chronophage. Chaque transition entre deux images devait rester organique, fluide, sans que mon visage ne parte en vrille dans une toupie dimensionnelle incontrôlable.
5. iMovie : le chef d'orchestre des émotions
Rushs exportés, direction iMovie pour la grande symphonie finale. J'y intègre la bande sonore, soigneusement sélectionnée dans ma playlist personnelle. Le piège ? Chaque morceau insuffle une humeur radicalement différente.
S'ensuit un long tête-à-tête avec la timeline : calcul des durées, précision des coupes, dosage des fondus. En somme, faire danser 47 images sur une musique qui n'avait pourtant rien demandé à personne.
6. Le marathon créatif : deux à trois jours d'intense alchimie
Entre Midjourney, les retouches minutieuses, le tri obsessionnel, le montage méticuleux et les innombrables tests audio, le projet a englouti 2 à 3 jours pleins. Long, certes, mais absolument fascinant : observer la transformation d'images statiques en une narration presque vivante, où des micro-détails imperceptibles créent l'illusion parfaite du mouvement.
7. Les défis : quand l'IA perd les pédales
La cohérence stylistique : maintenir une unité graphique entre 47 images issues d'expérimentations dispersées relève de la haute voltige.
Le syndrome du visage mouvant : l'IA adore réinventer mon anatomie. D'un plan à l'autre, je pouvais passer de barbu ténébreux à moine tibétain zen, sans transition.
L'ivresse algorithmique : certains rendus semblaient clairement inspirés par un cocktail explosif de caféine et de substances hallucinogènes.
Et puis il y a la fatigue, cette compagne fidèle de tout créateur numérique, et cette tentation lancinante d'abandonner — juste avant la ligne d'arrivée, évidemment.
8. Conclusion : apprivoiser le chaos créatif
Ce projet m'a enseigné une vérité essentielle : créer avec l'IA, c'est dialoguer avec un artiste brillant mais imprévisible. On croit piloter, diriger, contrôler — mais c'est souvent elle qui tient le volant.
Pourtant, lorsque tous les astres s'alignent — la lumière, le rythme, l'émotion —, une forme de magie opère. Une magie qui justifie chaque heure passée, chaque frustration surmontée.
Et au bout du voyage : 47 images, une vidéo, et un visage qui persiste malgré tout.
Le mien.
Enfin... à peu près.